Le titre attaché au propos qui suit, sonnerait presque comme une fable. Cela pourrait l’être. Or, il convient aux yeux des Troyens et des habitants de l’Aube d’être sérieux et respectueux puisqu’il s’agit d’évoquer en quelques mots la spécialité culinaire de référence de la région. L‘Andouillette de Troyes! Toute chose, possède son histoire. Sait-on que cette origine est liée à la fois à une révélation royale comme à un moment de littérature?
Nom, qualité, date?
En tous cas, l’attestation se situerait bien en-deçà de la date de 1590, où l’on fait état de son existence, sa production, sa dégustation pour remonter au Moyen-Age, autant que dans un grand classique satirique de la littérature médiévale: « Le Roman de Renard » ?
Rappelons, sous le contrôle des spécialistes et des puristes, que le mot « andouille » ou « andouillette » provient du bas-latin « inducare » qui signifie « introduire », « mettre dedans, à l’intérieur ». L’andouillette est un savant mélange de porc, finement taillée dans sa longueur, copieusement assaisonnée (sel, poivre, oignons), arrosée de vin blanc, et scrupuleusement mitonnée plusieurs heures. La délicate composition a reçu une estampille de qualité, dotée d’un « 5 A » (Association Amicale des Amateurs d’Andouillette Authentique), dont le but est de préserver son identité et sa spécificité.
Sommes-nous dans la légende, lorsque nous retenons la date de…878 ?
Au menu d’un festin à la fois royal et papal, et suite au sacre de Louis le Bègue par le pape Jean VIII dans cette bonne ville de Troyes, se tint un concile réunissant tous les protagonistes. Le menu du jour était une andouillette. On rapporte des commentaires élogieux sur le morceau de choix qui reçu l’onction papale!
L’Andouillette et son roman
Quelques trois siècles plus tard, apparaît un roman satirique, mettant en scène un renard ou Goupil, en vieux français, un personnage truculent et audacieux, malin et hypocrite, qui n’est pas à un coup pendable près. Ce récit de forme octosyl- labique, de longueur variable raconte l’histoire d’un loup (Ysengrin), ennemi juré de Goupil. L’intention des auteurs, sans doute un groupe d’anonymes est de dénoncer la classe sociale dominante, incapable de la moindre compassion à l’égard des petites gens, en lutte contre la faim, la violence et la bêtise.
Le passage qui rappelle l’existence de l’andouillette attestée comme un met déjà reconnu, oppose Tibert, le chat de la farce et Goupil. Celui-ci se lance dans une rhétorique subtile, centrée sur la nécessité de s’entraider. Le but est de s’emparer du morceau suspendu à une croix. La convoitise est l’objet de la dénonciation.
Depuis l’andouillette suscite tous les commentaires. Rabelais en parle, Louis XIV y a gouté, Napoléon en a été « impérialement satisfait ». On peut contester les dates et anecdotes. Mais il est établi que si un moment de convivialité est possible, c’est bien autour de ce produit généreux qui tient dignement sa place dans le grand concert de la richesse gastronomique de France.